Dans la transition comme ailleurs peuvent coexister
différentes façons de faire: l'action publique doit favoriser la diffusion
des meilleures pratiques, en s'affranchissant sans hésiter d'une pseudo
contrainte de neutralité (notamment vis à vis de la concurrence... "libre
et non faussée"!)
Par exemple, pour la rénovation thermique des bâtiments anciens, il est
inefficace & coûteux de procéder à plusieurs rénovations partielles, au gré des
propositions de divers démarcheurs à la fois peu compétents et peu scrupuleux.
Sur un terrain qui se prête à toutes sortes de malversations et de
déconvenues... il est vital de mieux faire connaître l'excellent travail de
l'Institut Negawatt, et plus généralement, de publier et tenir à jour une liste
des meilleures pratiques couvrant les divers thèmes de la transition
écologique.
Sur la question critique du financement de la transition, mettre en
oeuvre sans tarder les excellentes propositions de la page 472 du Rapport final,
notamment la... "Constitution, à partir des institutions existantes d’un
pôle public financier,
permettant de collecter l’épargne des entreprises et des ménages et de
l’utiliser vers des investissements verts [...] "
La cohérence de l'action des pouvoirs publics est une
condition nécessaire de succès des démarches de transition. En dépit de la
présence des lobbies dans les couloirs du Parlement, (à Paris comme à
Bruxelles), elle n'est ni exigée ni garantie.
Même si la proposition figurant page 490 du rapport final de la CCC a,
hélas, été mise de coté (notamment en raison de l'action étrange de membres du "Co-Gouv",
du Groupe d'Appui, ou du Comité Légistique), il est important de cesser de
l'ignorer:
lorsque l'action publique soutient des démarches ou engagements
contradictoires, l'argent du contribuable est gaspillé, tandis que la
qualité du débat et de la décision publics, est compromise par les lobbies,
leurs "communiquants"... et leurs chargés de relations publiques !
Plus que "Gouverner, c'est prévoir", les dirigeants lucides savent que...
"Vivre, c'est choisir" ! Choisir par exemple... entre la protection du
climat et ... les ALE (Accords de Libre Echange), car ces derniers confient à des
groupes industriels apatrides la responsabilité de fixer de nouvelles normes (ou
de nouvelles "doses journalières admissibles"...). Pourquoi ignorer
que ce sont elles qui
déterminent largement notre conso de matière & d'énergie, donc nos émissions. (Sans
oublier... notre santé !)
N.B1. Il s'agit des "Comités de coopération réglementaire" mis en place
par les accords de commerce déjà en application, (Canada, Japon, Singapour), ou
ceux qui le seront bientôt. (Viet Nam & Mercosur.)
N.B2. Le récent rejet par le Parlement Chypriote de l'accord avec le Canada
devrait, en toute logique... mettre fin à l'application provisoire...
de cet accord. Nous verrons bien si les lobbies, ou les services juridiques de
l'UE, trouvent l'un des "habillages" dont ils ont le secret, pour faire "comme
si"... Chypre ne l'avait pas rejeté.
Sans le courage ni l'expérience politiques, il est impossible de respecter
l'accord de Paris sur le climat: il suppose par exemple:
- d'éviter d'utiliser une large part du produit de la (mal nommée...) "Taxe
Carbone" pour financer des mesures sans rapport avec la protection du Climat
(CICE par exemple...)
- d'utiliser au contraire une (mieux nommée...) "Contribution Climat Énergie",
exclusivement pour réduire le fardeau qu'elle impose à ceux qui sont "loin
des transports en commun et... proches du seuil de pauvreté".
En effet, faute d'action corrective, les mesures de réduction des émissions
peuvent avoir pour conséquence indésirable d'aggraver les inégalités, c. à
d. être incohérentes avec la volonté, affichée au fronton de nos mairies... de
les réduire ! Même si ce lien entre climat et inégalités n'est pas évident,
les exigences de cohérence et d'acceptabilité sociale, (c. à d.
d'efficacité), imposent de ne pas le perdre de vue.
- d'instruire les préfets d'appliquer sans faiblesse les mesures existantes
de protection de l'environnement, au lieu de les relâcher toujours plus
(notamment dans les sites "Seveso seuil haut", à Rouen, ou Montoir de
Bretagne...) L'espoir toujours déçu de limiter les suppressions d'emploi, ne
doit plus contribuer à baisser la vigilance des services de l'État.
- d'éviter les distorsions, (délibérées ou non...), de mesures comme le
nouveau tarif "progressif" du gaz (ceux qui en consomment beaucoup le
paieront plus cher), du moins tant que subsiste le tarif "dégressif" de
l'électricité.
Décourager la conso de gaz & maintenir l'incitation à consommer toujours plus
d'électricité, dénoterait un manque de lucidité: avec ou sans relance du
nucléaire, aucun scénario ne permet de se passer du gaz fossile avant au moins
15 ans.
- Soutenir moins mollement la croissance du parc actuel de chaudières à
co-génération: énoncer par exemple un objectif de progression de 5 à 16
GW de Co-gen. d'ici 2033. (C. à d. passer de ~11 à ~36 TWh de prod.
électrique en Co-Gen.) Cette mesure procurerait un double bénéfice:
# quelques milliards de moins, chaque année, sur le déséquilibre de la balance
des paiements (car... faire avec 1 m3 de gaz, ou 1 t de biomasse, la même chose
qu'avec 2, c'est moins d'importations de combustibles fossiles), et
# un revenu (ou baisse de factures EdF), de quelques milliards /an au profit de
2 ou 3 millions de copropriétaires, ayant, (par hypothèse), opté pour la Co-Gen.
La cohérence de l'action publique suppose que le tarif "progressif" du gaz ne
devienne pas un obstacle supplémentaire à un recours à des chaudières à gaz plus
efficaces.
- Au milieu du siècle dernier, Alfred Sauvy disait:"Bien
informés les hommes sont des citoyens, mal informés, ils deviennent des sujets."
Il est peu de questions qui dérangent et divisent autant que les mesures de
réduction des émissions...
Toute contradiction, toute incohérence, réelle ou apparente, peut devenir
source de rejet d'une disposition pourtant salutaire (Voir ce qui se passe pour
le port obligatoire du masque: lorsque de hauts responsables - mal informés ou
ne disposant pas des connaissances nécessaires - procèdent par affirmations,
cela peut être désastreux.)
Ainsi, le "changement des comportements" et la réduction des émissions
dépendent de façon critique de la fourniture de "Parce que"... convaincants & de
la qualité & la transparence des informations.
-
De son coté, Albert Camus disait (à peu près en même temps qu'Alfred Sauvy): "Mal
nommer les choses, c'est ajouter aux malheurs du monde".
Sur ce plan, la réduction des émissions a consacré l'usage de termes tels que "Stratégie
Nationale Bas Carbone" ("SNBC"), ou encore: "Décarboner le PIB", sans
oublier... "Taxe carbone" !
Or, la transition aura pour effet d'augmenter les usages de carbone non
fossile ("Bio-gaz"... "Biomasse énergie"... ou même, Immeubles en
bois), qui constituent des contributions (directes ou indirectes...), à la
réduction des émissions de carbone fossile !
Les spécialistes ne risquent pas d'être troublés par cette incohérence, car il
savent que la SNBC vise principalement, (sinon exclusivement...) le carbone
fossile. (Le facteur d'émission de kWh produits avec du carbone non fossile est
7 à 10 fois plus faible.)
En suivant Camus, n'est-il pas souhaitable de cesser d'oublier "Fossile"
lorsqu'on parle de "taxe carbone" ou de "bas carbone" ?!